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Exportations de cacao de Côte d’Ivoire et déforestation

8 May 2024
6 min read

Trase cartographie le commerce international du cacao de Côte d’Ivoire, révélant quelles entreprises commerciales et quels marchés de consommation sont les plus exposés à la déforestation.

Cocoa pods

WORLD AGROFORESTRY

De Valentin Guye

La Côte d’Ivoire est le plus grand pays producteur et exportateur de cacao au monde. Elle a produit entre 2,10 et 2,15 millions de tonnes de fèves de cacao par an de 2019 à 2022, avec un pic à 2,25 millions de tonnes en 2021 (ICCO). Environ 70 % de la production est exportée chaque année sous forme de fèves brutes, 12 % sous forme de pâte de cacao et 7 % sous forme de beurre de cacao. La valeur des exportations de cacao a culminé à 5,06 milliards de dollars en 2021, avant de tomber à 4,47 milliards de dollars en 2022, valeur la plus basse de la période 2019–2022.

De 2003 à 2017, Trase calcule que 1,65 million d’hectares de forêt tropicale humide ont été convertis en plantations de cacao en Côte d’Ivoire, ce qui représente 45 % de la perte totale de forêt tropicale humide du pays. Cela représente un taux de déforestation annuel de 110 000 hectares, soit une superficie presque équivalente à la taille de la ville de New York. L’intensité de la déforestation due à la culture du cacao par rapport à la production ivoirienne est passée de 680 hectares pour mille tonnes de fèves (ha/kt) en 2019, à 730 ha/kt en 2021, avec un pic à 770 ha/kt en 2020.

Trase relie les produits de base cultivés sur des terres récemment déboisées aux entreprises et aux marchés exportateurs, en tenant compte des périodes de latence entre la déforestation, la récolte et l’exportation. En ce qui concerne le cacao, Trase utilise une période de 15 ans pour attribuer la déforestation à la production de cacao. La déforestation due à la culture du cacao attribuée aux exportations en 2021 est donc calculée en se basant sur l’expansion de la superficie cacaoyère dans les forêts entre 2003 et 2017.

Zones critiques régionales à risque

Trase montre les niveaux de déforestation liés à l’expansion de la production de cacao dans chaque département de la Côte d’Ivoire en 2021. La moitié de toute la déforestation liée à la culture du cacao se concentre dans 9 des 63 départements produisant au moins 500 tonnes de cacao. Parmi ceux-ci, Sassandra, San-Pedro, Guiglo, Tabou et Lakota enregistrent la plus forte déforestation due à la culture du cacao. Sipilou, Biankouma, Man, Danane et Guiglo sont les cinq départements où le cacao représente la plus forte intensité de déforestation par tonne de production – supérieure à 1 200 ha/kt.

Exposition des négociants et des marchés à la déforestation

En 2021, les six plus grands négociants ont exporté plus de 75 % de toute la déforestation due à la culture du cacao en Côte d’Ivoire. L’Union européenne (UE) et la Suisse ont importé 1,1 million de tonnes de produits à base de cacao en 2021 (mesurés en équivalent fèves brutes), associés à 800 000 hectares de déforestation tropicale. Beaucoup de ces produits à base de cacao sont importés dans l’UE via les Pays-Bas. Les États-Unis et la Malaisie ont importé respectivement plus de 300 000 et 190 000 tonnes de produits à base de cacao en 2021 et ont été exposés à 224 000 et 141 000 hectares de déforestation.

L’exposition à la déforestation varie également selon les négociants et les marchés en fonction de l’intensité de la déforestation due à la culture du cacao par rapport à la production dans les départements où ils s’approvisionnent. L’exposition des exportations à la déforestation par tonne varie selon les négociants, allant de plus de 750 ha/kt pour Touton et Olam, à moins de 650 ha/kt pour Ecom et Cocoasource en 2021. En ce qui concerne les pays, la variabilité est moindre dans l’intensité de la déforestation par tonne, car ils importent à partir d’une variété de négociants et départements différents.

Une caractéristique importante de la chaîne d’approvisionnement du cacao de Côte d’Ivoire concerne l’ampleur de l’approvisionnement indirect en cacao via des fournisseurs intermédiaires, contrairement à l’approvisionnement direct auprès des coopératives de producteurs. Trase montre que pas plus de 40 % du cacao ivoirien est acheté directement, ce qui rend difficile de savoir d’où provient l’approvisionnement restant et de quantifier son exposition à la déforestation. Les entreprises important du cacao dans l’UE devront démontrer que ces approvisionnements sont « sans déforestation » afin de se conformer à la réglementation européenne sur la déforestation.

Engagements « zéro déforestation »

En 2020, sept entreprises négociant du cacao de Côte d’Ivoire avaient divulgué publiquement des engagements « zéro déforestation » (EZD), représentant collectivement 80 % des volumes exportés. En 2022, trois autres entreprises avaient pris des EZD. Cependant, la proportion des exportations traitées par des négociants ayant des EZD est tombée à 77,5 % en 2022.

Guye, V. (2024). Exportations de cacao de Côte d’Ivoire et déforestation. Trase. https://doi.org/10.48650/0EAH-P079

Trase. (2024). Modèle de la chaîne d’approvisionnement SEI-PCS Cacao de Côte d’Ivoire v1.1 : Sources de données et méthodes. Trase. https://doi.org/10.48650/MS9M-H814

Guye, V., Gollnow, F., Biddle, H., Ribeiro, V., Meyfroidt, P., Renier, C., & zu Ermgassen, E. K. H. J. (2024). Côte d’Ivoire cocoa supply chain v.1.1 (2020–2022) (Version 1.1) [Data set]. Trase. https://doi.org/10.48650/E5CN-FH18

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